On entend dire souvent que lâUnion EuropĂ©enne se renforce vĂ©ritablement dans les situations de crises, quâelle se construit dans lâadversitĂ©. Il est vrai que dĂšs le dĂ©part, ce fut un projet de paix et de reconstruction en rĂ©ponse Ă la guerre. Avec le Green Deal, la rĂ©action Ă la pandĂ©mie du Covid, le plan de relance et la dette commune, ou entre avec les sanctions Russes, les diffĂ©rentes Ă©tapes de la construction europĂ©enne illustrent encore aujourdâhui ce phĂ©nomĂšne.
Alors du coup, la construction europĂ©enne sâaccĂ©lĂšre ⊠câest heureux, mais câest surtout que les crises augmentent en frĂ©quence et en intensitĂ© ces derniĂšres annĂ©es, elles deviennent la norme ! crise financiĂšre, Ă©conomique, sanitaire, crise Ă©nergĂ©tique, gĂ©opolitique, climatique ⊠Peut-on enfin questionner ce processus, toujours en rĂ©action, jamais en anticipation ?
âQui aurait pu prĂ©voir la crise climatique?â Bah pas mal de monde en fait. Tout comme les autres, notamment les crises financiĂšres ou lâaugmentation des risques Ă©pidĂ©miques, toutes documentĂ©es. Mais face Ă ces dĂ©fis, la solidaritĂ© europĂ©enne et sa capacitĂ©, sa volontĂ©, dâanticipation restent trĂšs faibles.
Câest que la gouvernance europĂ©enne consiste avant tout en un ensemble de rĂšgles et de procĂ©dures visant Ă faire respecter une discipline budgĂ©taire par les Ătats membres ou Ă faciliter la coordination de leurs politiques Ă©conomiques.
Renversons la logique, celle âdu pompierâ qui consiste Ă mobiliser les milliards pour rĂ©parer les pots cassĂ©s pour ensuite mieux justifier un retour Ă la rigueur financiĂšre, une logique pas trĂšs politique, purement quantitative qui nĂ©glige la qualitĂ© de la dĂ©pense et qui in fine nous coĂ»te plus cher : 1 euro dĂ©pensĂ© dans la transition Ă©cologique et solidaire sera toujours mieux dĂ©pensĂ© que 10 euros dans le soutien aux Ă©nergies polluantes, qui, en plus de condamner un peu plus notre trajectoire climatique, alimentent aussi des guerres injustes.
Lâunion europĂ©enne peut aussi avoir une vision Ă long terme ! son budget pluriannuel a un horizon de 7 ans, câest unique en Europe. Mais elle nâa pas les moyens de la rĂ©aliser, cette vision. Elle est mal Ă©quipĂ©e : le budget ne reprĂ©sente que 1% du PIB de lâUnion EuropĂ©enne, dont le tiers part dĂ©jĂ directement dans la PAC – la politique agricole commune. Nous sommes encore prisonniers du temps court et de la concurrence interne.
RĂ©cemment, le monde des banquiers centraux a doucement commencĂ© Ă rĂ©aliser ce besoin de changement de paradigme, avec la publication en 2020 dâun rapport nommĂ© âle cygne vertâ, inspirĂ© de la thĂ©orie des cygnes noirs – comment gĂ©rer ces Ă©vĂšnements – notamment Ă©cologiques – qui passent sous nos radars statistiques ?
Face aux crises, pour la jeunesse, pour les citoyennes et les citoyens, face aux dĂ©fis Ă©nergĂ©tiques, Ă©cologiques, Ă©conomiques, pour promouvoir des valeurs compatibles avec le vivant, et les limites planĂ©taires, pour une Europe de la sobriĂ©tĂ© et de la prospĂ©ritĂ©, il est temps de se hisser Ă la hauteur des enjeux et dâavoir aussi notre moment âcygne vertâ pour toutes les politiques publiques de lâUnion EuropĂ©enne.

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